Mises à part les considérations sur la génétique, on ne trouve pas beaucoup de choses sur l’importance du sanitaire en élevage et c’est dommage, pour au moins deux raisons :

  • Sans même parler des échanges internationaux, l’achat de reines ou de cellules est un très efficace vecteur de dissémination de micro organismes, parasites portés par les reines, les accompagnatrices ou tout simplement d’œufs présents dans les cagettes.
  • Une jeune reine confrontée à un pathogène au cours du processus d’élevage n’exprimera pas nécessairement de faiblesse dans les semaines suivant son introduction, mais son état sanitaire conditionnera la vigueur et la résistance aux maladies de la colonie. De fait, la rigueur sanitaire appliquée aux procédés d’élevage constitue une des fondations de la résistance de la colonie. Un bon article (en Anglais) fait un point sur le sujet ici.

On pourrait également parler de « qualité de reine », mais que cherche-t’on dans une reine que l’on paiera un certain prix ? La génétique, le dynamisme des F1, des caractères en production, à la rigueur sa longévité – mais sur ce point difficile de savoir à quoi s’attendre, même si par exemple on peut avoir des doutes sur le potentiel de reines fécondées en fin de saison, période ou les ruches à mâles sont anormalement chargées en varroas.

Autant les sujets sur les besoins alimentaires ou la gestion des caractères génétiques (et les tests correspondants) sont bien documentés dans les ouvrages ou les formations spécialisée,  autant le chapitre « le sanitaire en élevage » est le parent pauvre, et c’est dommage. C’est l’occasion de faire un premier tour d’horizon du sujet.

On gardera en tête tout d’abord deux spécificités du sanitaire en élevage :

  • Il y a ouverture, inspection et surveillance constante des ruches et nucleis. C’est une bonne chose car grâce au « nez » de l’apiculteur, on détecte en principe rapidement une situation anormale ou suspecte, avec la possibilité de réagir en conséquence.
  • En revanche l’élevage entraine des transferts multiples de matériel entre ruches et entre ruchers. Le risque de contamination croisée, et les mesures de prévention correspondantes, doit être une préoccupation constante pour l’éleveur.

On peut lister les agents pathogènes isolés de jeunes reines d’élevage ou que l’on pense potentiellement transmissibles :

  • Les virus : virus (BQCV) de « la maladie noire de la reine », virus (DWV) des ailes déformées détecté dans la spermathèque, virus (CBPV) de la paralysie chronique qui été transmis expérimentalement par contamination de la larve, et d’autres virus (ABPV, Israeli) qui sont suspectés mais n’ont pas été isolés.
  • Nosema – en rappelant que le changement de reine fait partie du protocole de gestion de la maladie déclarée.
  • Les acariens : Varroa destructor phorétique, Acarapis woodi (acarien des trachées) et potentiellement Tropilaelaps (autre « cousin » du Varroa).
  • Sans oublier le rôle potentiel de « véhicule » de la cagette : On redoute une introduction d’Aethina (petit coléoptère des ruches) via des œufs qui seraient transportés dans une cagette de reine.

Ou sont les points de vigilance sanitaire particuliers dans le processus de production de reines fécondées ?

  • L’état sanitaire des colonies souches et éleveuses est bien sûr essentiel : mesure régulière de la pression varroa (comptage), rotation accélérée des cadres, exigence particulière vis-à-vis de la cire (analyse de cire recommandée), sortie du cycle et recherche de pathogène précoce en cas de doute.
  • Il est recommandé de pratiquer le greffage dans un environnement fermé, pratique à nettoyer et avec un protocole opérateur limitant les risques de contamination du matériel (cupules, barrettes). Ce n’est pas toujours possible bien sur, mais c’est une recommandation – et par ailleurs l’opérateur gagnera en confort.
  • La spécialisation des cadres d’élevage par ruche est importante. On limitera ainsi le risque de contamination croisée et par ailleurs l’acceptation sera probablement meilleure sur un cadre portant l’odeur de la colonie.
  • L’hygiène et la désinfection rigoureuse des couveuses et boites isotherme de transport de cellules doit être systématique (javel).
  • Il est intéressant de garder pour examen les cellules que l’on sort de la production (nymphe morte, suspecte ou présentant une anomalie de développement). On se livrera à l’examen bien entendu hors du local de greffage ! Un examen de routine recommandé, simple qui peut être fait en différé – cellules mises au congélateur dans une enveloppe portant le numéro de lot.
  • Le bon état des nucleis, le remplacement sans état d’âme du matériel, les procédures d’hygiène et de désinfection d’accès aux ruchers de fécondation sont importants.
  • Le contrôle sanitaire des ruches ou banques à mâles est essentiel, notamment en ce qui concerne l’infestation à varroas. On gardera en tête qu’en apportant à intervalle régulier des cadres à couvain de mâle dans ces ruches, on augmente « en marches d’escalier » la population de Varroas dans la ruche au cours de la saison. Sachant qu’un faux bourdon ayant fait sa pupaison en compagnie d’une femelle varroa reproductrice perdra environ 40% de ses capacités reproductrices, c’est de la qualité (longévité) de la reine fécondée qu’il s’agit ici. En station de fécondation professionnelle les ruches à mâles doivent faire l’objet d’un protocole anti varroa spécifique. C’est de notre point de vue un impératif absolu.

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